Beautés équivoques : l’exposition Bernardaud du moment

Depuis 2002, La Fondation d’entreprise Bernardaud nous propose des expositions de belle facture dans un lieu culturel hébergé dans une partie des anciens ateliers à Limoges.

La nouvelle exposition de la Fondation Bernardaud à Limoges ne peut laisser indifférent et je crois que c’est le but visé puisqu’elle interroge sur la place de l’homme dans la nature. A l’heure des pandémies et autres bouleversements climatiques et environnementaux, pourquoi ne pas s’intéresser à ce qu’en pensent les artistes qui ont eu le temps de réfléchir au thème pendant les confinements pour s’imprégner davantage de ce que nous vivions réellement?

Dans l’exposition, douze artistes céramistes parmi les plus grands noms de la porcelaine contemporaine venant de huit pays différents ont donc prêté leurs oeuvres jamais exposées en France.

Ces pièces uniques rassemblées dans cette exposition par la commissaire Stéphanie Le Follic-Hadida et la directrice de la fondation Bernardaud Hélène Hurret peut surprendre, déranger voire repousser et nous offre une vision particulière de la beauté. D’ailleurs le nom de l’exposition est là pour nous le rappeler: Beautés équivoques.

Vous êtes prêts pour une visite sous le prisme des kaolines ?

Dès l’entrée le sculpteur Russell Wrankle s’inspire des Fables du grec Esope pour dépeindre avec une faience rouge la condition humaine et la violence: tête de dindons ensanglantées, lapins désossés nous interpellent d’emblée.

Je ne vous cacherai pas que j’ai préféré certaines pièces en porcelaine blanche de l’artiste coréenne Wookjae Maeng qui aborde la question des manipulations génétiques de l’homme et plaide en faveur d’une cohabitation plus harmonieuse entre l’homme et l’environnement.

Linda Swanson est la seule artiste à ne pas présenter d’oeuvres figuratives dans l’exposition mais explore la céramique et sa réaction en la soumettant au feu à l’eau et à des sels et composants métalliques contenus dans l’émail. Son travail que je trouve très poétique et assez apaisant au sein de l’exposition laisse la matière réagir, se cristalliser, créer des bulles et finalement être libre. L’artiste accepte l’imprévisible, refuse de maitriser la nature.

L’américaine Beth Katleman propose une installation en trois dimensions qui occupe un mur entier de l’exposition baptisée Mastering Paradise.

On peut rester un long moment à contempler son travail et à s’émerveiller de la précision de la porcelaine et des détails reliés entre eux par des chaînes de perles. On se croirait presque dans une composition en toile de Jouy, avec une touche rococo. Mais ne croyez pas que ces petites scènes soient juste décoratives ? Non l’artiste y dénonce la surconsommation, le futile et les vices de notre société.

Moss People, la série de personnages oniriques m’a très vite attirée par sa couleur verte et la mise en lumière scénographique de l’exposition. Ces elfes sont en grès recouverts d’une sort de flocage vert qui m’a fait pensé tout de suite à des habitants d’une forêt mystérieuse, une civilisation perdue.

Enfin,je terminerai cette visite virtuelle par l’une des pièces les plus volumineuse de l’exposition: la cabane arbre (The Treehouse) du canadien Jeremy Hatch.Mais oui il s’agit bien de porcelaine, du biscuit précisèment et non pas de bois blanchi comme on pourrait s’y laisser prendre. Un pommier dont certaines branches ont été grossièrement coupées abrite une sorte de cabane en planches cloutées.

Cela pourrait sembler attachant, cette idée de cabane dans l’arbre nous ramenant à l’enfance mais The Treehouse nous propose de nous interroger sur les gestes de l’homme et ses actions qui peuvent avoir des conséquences catastrophiques. Cet arbre n’est il pas finalement amputé de ses membres ?

Ne vous avais je pas prévenu que ces céramiques interrogeaient la conscience de ceux qui les regardaient ? Alors oui, certaines pièces sont dérangeantes parce que loin de l’esthétique habituelle et nous obligent à réfléchir au choix de l’artiste, à ce qu’il souhaite exprimer.

Mais après tout, cela nous permet de nous questionner sur la fonction même de l’artiste contemporain qui je crois doit porter un regard ouvert sur notre monde pour parfois en dénoncer les travers.

Beautés équivoques à voir jusqu’au 2 avril 2022

Fondation Bernardaud

22 avenue Albert Thomas

87000 Limoges

Pensez à réserver votre visite guidée au téléphone au 05 55 10 55 91

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